J’accorde traditionnellement peu d’importance aux collections Croisière, j’en ai d’ailleurs déjà parlé lors d’un article précédent. On pourrait avoir l’impression qu’elles ne viennent rajouter que de la complexité dans des collections déjà multiples. Sauf qu’elles sont bien plus importantes qu’elles n’y paraissent.
En backstage du défilé Croisière 2015 de Chanel
Ces derniers jours, Dior, Chanel puis Louis Vuitton ont présenté leurs collections Croisière 2015 lors de défilés évènementiels, respectivement à Brooklyn, Dubaï et Monaco. Si les marques investissent tellement dans ces collections en cherchant à en faire un rendez-vous incontournable de leur calendrier, c’est parce qu’elles ont pris un poids conséquent dans le chiffre d’affaire du prêt-à-porter des marques de luxe, atteignant même les 70% chez Louis Vuitton! Plusieurs choses peuvent expliquer cela.
Nicolas Ghesquière, ovationné à la fin du défilé Croisière 2015 de Louis Vuitton
Les collections Croisière servent de transition entre les propositions des collections Printemps-Eté et Automne-Hiver et sont présentes plus longtemps sur les surfaces de vente. Coincées entre les deux grandes saisons traditionnelles du prêt-à-porter, elles sont moins fortes, plus discrètes, moins intellectuelles et plus portables que les collections traditionnelles qui, face à une concurrence qui fait rage pendant les Fashion Weeks, sont traditionnellement très marquées et souvent conceptuelles. Comme leur nom l’indique, les collections Croisière sont nées pour accompagner la riche clientèle pendant ses vacances sur de magnifiques paquebots et doivent donc être légères pour s’adapter à la température, pratiques car portées pendant une période de détente tout en restant élégantes et raffinées. C’est cette équation qui fait que les collections Croisière sont souvent les plus transposables dans la vie de tous les jours.
Sidney Toledano, PDG, Rihanna et Raf Simons, Directeur Artistique, au défilé Dior Croisière 2015.
Mais l’importance que revêtent aujourd’hui les collections Croisière est révélatrice de l’état général du marché du luxe. La clientèle s’étant déplacée vers des régions comme le Moyen-Orient ou le Brésil, ces collections sont simplement plus adaptées au mode de vie des nouvelles consommatrices. Quel intérêt d’acheter un long manteau bien chaud de la collection Hiver 2014-2015 de Céline lorsqu’on réside à Doha ? Pourquoi investir dans une fourrure Fendi quand la température ne descend pas sous les 21 degrés l’hiver ? La clientèle des maisons de luxe a changé et on peut se demander si les collections Croisière ne vont pas devenir plus importantes que les collections européo-centrées présentées lors des Fashion Weeks. Les collections Croisière s’adressent simplement à la cliente finale et ne tournent pas autour d’un « statement » mode à destination des rédactrices. Cette simplicité est sans nul doute leur vrai atout.
